Après la chronique de la trilogie Havensele (éditions Rroyzz), son autrice Charlotte Bona a accepté ma demande d’interview. Je vous invite donc à en apprendre un peu plus sur sa biographie, l’écriture de cette trilogie avec ses thèmes et ses inspirations et, bien entendu, ce qu’elle prévoit de publier.
Pourrais-tu te présenter en quelques mots ?
J’ai 52 ans, je suis médecin et je vis au bout du monde avec mon mari et nos quatre filles. J’écris principalement pour les littératures de l’Imaginaire (Science-fiction ; anticipation et fantastique). Les thèmes abordés dans mes écrits reflètent mes centres d’intérêt et mes préoccupations en tant que citoyenne et mère : l’écologie, l’humanisme, le libre arbitre et bien sûr le féminisme et les luttes en faveur des minorités.
Pourquoi écris-tu de la SF et surtout de la science-fantasy ?
J’écris de la science-fiction parce que j’en lis depuis quarante ans ! Jeune adulte, mon cœur battait au rythme des personnages de Ténébreuse, de Pern ou de Dune. Par ailleurs, je fais partie de la génération qui a découvert au cinéma – enfant ou adolescent – des films de science-fiction qui ont marqué définitivement l’histoire du septième art : Star Wars, Highlander, Retour vers le futur, Blade Runner ou Terminator, pour n’en citer que quelques-uns. La SF, c’est un peu la madeleine de Proust de ma jeunesse, d’autant plus que le goût pour cette littérature m’a été instillé par mon père, aujourd’hui décédé. Sur un plan plus factuel, la science-fiction, notamment l’anticipation et la climate-fiction, constitue un merveilleux moyen de dénoncer les dérives et problèmes du monde actuel.
Au sujet de la trilogie Havensele
D'où t'es venue l'idée de l'écrire ?
Ce projet est né durant une période assez particulière de ma vie. Je venais d’arrêter mon activité chirurgicale et je me retrouvais avec beaucoup de temps libre. Nous étions en période électorale (2012) et je réfléchissais à une forme plus aboutie de gouvernement, avec les avantages de la démocratie, mais sans ses inconvénients. J’étais arrivée à une forme de synarchie avec des êtres « supérieurs » dévoués au bien-être de leur communauté. Havensele était née.
Combien de temps as-tu mis ?
L’écriture (premier jet) du tome 1 m’a pris 18 mois, les corrections de fond et de forme… deux ans. Cela a été plus rapide pour l’écriture des deux autres et les corrections se sont révélées moins importantes grâce à l’expérience acquise. Entre écritures, corrections, BAT (Ndlr : Bon à Tirer), Havensele aura occupé presque huit années de ma vie d’autrice, entrecoupées néanmoins de quelques pauses pour écrire des nouvelles.
Avais-tu un plan ou les événements venaient au fur et à mesure de l’écriture ?
Oui, j’avais un plan et je savais comment se finissait Havensele. Je semais des petits cailloux depuis le tome 1 en espérant que le lecteur arrivé à la fin du tome 3 s’écrirait : mais oui ! C’était sous mon nez depuis le début ! L’histoire était initialement construite en deux tomes, mais certains personnages se sont émancipés. Au fil de l’écriture, il m’a paru évident que trois tomes seraient nécessaires pour développer correctement leur caractérisation et leurs fils d’intrigues.
As-tu une source d’inspiration pour l’entité d'Havensele et son univers ?
Pour le côté télépathie, indéniablement La romance Ténébreuse de de Marion Zimmer Bradley. Pour l’aspect sociologique, Ursula K. Le Guin. Et pour le côté anticipation/dystopie : René Barjavel, Aldous Huxley, George Orwell et Ray Bradbury. Quant à l’existence d’une cité souterraine en Islande, à proximité d’un volcan, il s’agit d’un clin d’œil à un de mes romans préférés de Jules Verne (Ndlr : Voyage au centre de la terre).
Quelle(s) est ta/sont tes scènes préférées et pourquoi ?
Une scène un peu érotique du tome 3 et toute la scène de fin du tome 2 qui se déroule sur l’île des parents de Markus. La première, parce que je l’avais dans la tête depuis pas mal d’années et qu’elle marquait un tournant majeur dans la relation de mes personnages. La deuxième, parce qu’il s’agissait d’un challenge pour moi : écrire une scène d’action prenante qui permettait de réunir des fils d’intrigue différents avec des personnages ne vivant pas au même endroit et – pour certains – ne se connaissant pas.
As-tu un personnage préféré ? Et un que tu détestes ? Pourquoi ?
Mes bêta-lectrices pourraient le confirmer, mon personnage préféré a toujours été Alexian Andlauer. C’est le bad boy de service, mais un homme beaucoup plus profond au fur et à mesure que l’histoire progresse. C’est également le personnage le plus ambigu et aussi le plus nuancé. Une sorte de chevalier noir. Je n’ai détesté aucun personnage, même les antipathiques. Lorsque le lecteur embrasse leur point de vue, leurs raisons de (mal) agir doivent prendre tout leur sens, donc moi aussi. Je dois néanmoins avouer que Thomas m’a souvent beaucoup énervée !
Aimerais-tu vivre l’expérience de Mathilde ? Ou d’un tout autre personnage ?
Celle de Mathilde… Non ! (J’en frissonne), plutôt celle de Thomas et des médicastres, lorsqu’ils soignent grâce à leur don de biokinésie. C’est un vieux fantasme de chirurgien : opérer de l’intérieur, sans cicatrice.
Quel commentaire de lecteur ou lectrice t’a le plus touchée ?
Une lettre d’un lecteur, envoyée à l’adresse de mon éditeur et arrivée ensuite entre mes mains. Je ne résiste pas au plaisir de la partager avec vous : « (…) lors de vacances passées dans le Finistère Nord, à Morgat-Crozon, j’ai eu l’occasion de lire Cité rouge de la série Havensele. C’est une belle œuvre, écrite avec beaucoup de force, de maîtrise et d’imagination. Bravo donc pour ce roman. Préparez-vous pour 2022 ou pour 2023 quelques nouveaux livres, romans ? Nouvelles ? (…) »
Et maintenant le futur...
Prévois-tu d’autres histoires dans l'univers d'Havensele ?
Pas pour l’instant. La fin de l’histoire s’achève réellement à la fin du tome 3, une promesse faite à mes lecteurs.
Prévois-tu d’autres histoires ?
Mon quatrième roman – le Club des Ados Mal Fichus – est en soumission, une histoire mêlant fantaisie et fantastique, se déroulant dans les Monts d’Arrée et ayant comme personnages des adolescents porteurs de handicaps. J’y exploite – à ma manière – les principales Légendes de la Mort recensées par Anatole Le Braz dans son recueil. Ma sixième nouvelle a été publiée dans l’anthologie d’Etherval, portant sur les Imaginaires en Asie. De la climate-fiction qui se déroule dans le Cambodge du futur. Sinon, je suis en train de corriger trois nouvelles de SF et je compte bien reprendre à la fin 2022 l’écriture de mon cinquième roman, un thriller contemporain. Ensuite, j’ai comme projet un thriller à l’hôpital, un roman de fantasy féministe et un roman steampunk légèrement horrifique. Si les idées ne me manquent pas, je cours après le temps pour écrire, ce qui est le cas de la majorité des autrices et des auteurs !
Le mot de la fin
Je remercie Charlotte Bona pour cet interview. C’est toujours un plaisir de découvrir les coulisses d’un roman, et l’auteur/l’autrice qui a longtemps « transpiré » pour nous charmer, lecteurs/lectrices, d’histoires tant pour se divertir que pour réfléchir. Deux points très bien réussis dans la trilogie Havensele. Si vous vous promenez dans les salons littéraires – ceux en Bretagne, plus particulièrement – vous pourriez rencontrer Charlotte Bona au détours d’une allée ou d’un stand. Elle vous accueillera d’un grand sourire et parlera de ses livres volontiers. Alors n’hésitez pas !